Publié le 18 Octobre 2023

En vigueur depuis le 1er octobre dernier, l’article R1331-20 du code de la santé publique fait l’effet d’une petite révolution dans le milieu de l’immobilier et fait monter au créneau les associations de défense des locataires.

Pour être considéré comme décent, selon les termes énoncés dans un décret de 2002, un bien devait présenter une surface minimale de 9 m² et une hauteur sous plafond d’au moins 2,20 m. Ces dimensions correspondent à un volume minimal de 20 m3. La salubrité d’un bien était quant à elle déterminée par des règlements sanitaires départementaux (arrêtés préfectoraux contrôlés par les mairies).

Or, ce nouveau décret, s’il affirme toujours que « les locaux dont la hauteur sous plafond est inférieure à 2,20 mètres sont impropres à l’habitation », propose toutefois une exception. Il autorise la mise en location de biens dont la hauteur sous plafond est comprise entre 1,80 m et 2,20 m si le bien respecte les dispositions de l’article 4 du décret du 30 janvier 2022 au regard des caractéristiques de décence.

En clair, dès lors qu’un bien disposera d’au moins une pièce principale de 9 m² minimum, d’un volume supérieur ou au moins égal à 20 m3, il sera considéré comme salubre tant que sa hauteur sous-plafond n’est pas inférieure à 1,80 m.

Pour la Fondation Abbé Pierre notamment, cette nouvelle disposition ouvre la porte à l’apparition sur le marché de biens qui, même s’ils respectent les critères de décence édictés par la loi, ne pourront pour autant pas obligatoirement être considérés comme salubres. Les Français mesurent en moyenne 1,76 m (selon une étude publiée en 2020). Un bon nombre d’entre eux s’approcheront donc dangereusement du plafond. Un premier critère d’inconfort. Pour d’autres, les biens seront plus compliqués à meubler. On pense notamment aux chambres de bonne, situées sous les toits, dans lesquelles il est bien souvent difficile de « pandiculer » par exemple.

Voyez dans ce terme l’image de l’homme de Vitruve qui forme un cercle complet autour de lui avec ses membres en mouvement, sans rencontrer d’obstacle. Reportez cette image dans un bien de 12 m², mais ayant une hauteur sous-plafond de 1,80 m. Au regard des critères législatif, il serait donc décent. Or, pour « pandiculer » bras au-dessus de la tête, l’envergure devient plus grande que la taille. L’étude de 2020 indique que la taille de l’avant-bras d’un homme représente 1/6 de sa taille. Pour une personne de 1,60 m, cela représente 26,5 cm.

Lorsque vous levez le bras au-dessus de votre tête, votre avant-bras se trouve au-dessus de votre crâne. Pour cette personne de 1,60 m, cela porte alors sa hauteur totale à 1,86 m. Impossible donc de tendre complètement le bras, mais somme toute, très pratique pour changer une ampoule, à condition que cette dernière soit plaquée au plafond.

Si l’image prête à sourire, elle est toutefois très caractéristique de ce que pourraient bien vivre de nouveaux mal-logés, face aux dérives que pourrait engendrer ce décret. Le gouvernement va donc devoir affiner sa copie et prévoir des garde-fous pour empêcher les dérives.